Top Chef, programme phare de la chaîne M6, épuise
physiquement ses candidats, mais pas que…
La dernière émission en date du lundi 13
février laisse un goût étrange. C’est après avoir cuisiné « une
déclaration d’amour à leurs proches », accompagnée de moments d’émotion
coulants, que l’on a retrouvé les candidats au centre d’un chapiteau, sur une
musique digne d’une blockbuster
américain, se démener pour « le plus grand marathon
culinaire », explique Stéphane Rotenberg, sourire aux lèvres et voix
mielleuse. Les gladiateurs sont dans l’arène, et les lions rôdent autour d’eux.
Surplombant les candidats du haut d’un gradin, les chefs du jury proposent des
jeux tous plus extraordinaires et sadiques les uns que les autres, histoire
d’amuser la galerie-public, nécessaire à une part d’audience précieuse.
En somme, on s'aperçoit que le
gros matou M6 s’amuse à jouer avec les petites souris de candidats : un
jour, revoir amoureux, papas, mamans, pour de doux instants, et le lendemain,
dix heures de cuisine dans les pattes –visiblement ininterrompues !– pour
les maillons faibles, soit une succession de six épreuves qualifiantes.
Chacune de celles-ci est inventée par un des chefs : Ghislaine
Arabian impose de travailler légumes et épluchures ; Thierry Marx réclame
une forêt noire sans cuisson aucune ; Jean-François Piège proscrit le
sel ; et Christian Constant rêve de se voir présenter une omelette à
l’extérieur blanc, jaune à l’intérieur. Le cirque romain s’éreinte à
mesure, les candidats épuisés s’agitent au centre, courant derrière la moindre
miette d’un temps trop court, comme des taureaux aux yeux perdus et affolés
après des heures de combat acharné, pour ne pas retomber dans les antres de
l’anonymat. Cernes, excès verbaux, mains tremblantes et visages crispés
montrent une fatigue amplifiée par la pression des chefs, notamment une
Ghislaine Arabian virulente, osant couper sèchement la chique à un candidat
rincé mais relâché (ici), confiant être reconnaissant de l’aventure humaine offerte par Top Chef :
« vous vous parlez beaucoup [...] ah! Ben faut pas trop décompresser ! ».
Une journée rude,
pour une émission qualifiée par la
chaîne de « plus grand concours de cuisine réservé aux
professionnels ». Plus grand à quelle échelle, on ne sait pas, mais c’est
la nouvelle référence en matière de cuisine professionnelle, le nouveau
révélateur de talents toqués, l’Emission du cuisinier lambda français, en recherche d’aventures culinaires.
La téléréalité doit être
sensationnelle, spectaculaire, on n’a pas peur d’aller jusqu’à la mise
en scène d’une mise à mort. Et le cynisme télévisuel ne s’arrête pas là. Il
pousse jusqu’à l’édition de livres de cuisine et la mise en ligne, sur le site
internet de la chaîne, des recettes crées par les candidats naïfs, aux yeux
pétillants de flashs d’une précipitée médiatisation. Et ces derniers ont le plus
souvent signé de simples contrats de participation au jeu, « n’ayant
aucune valeur juridique », selon Jérémy Assous, avocat des ex de la
téléréalité, lors d’une interview aux Inrocks. Son cabinet compte environ
trois-cent dossiers, dans une vague annuelle de quelques mille-six-cent
participants rejetés à la mer, vidés de leur énergie, leur créativité, et leurs
droits, gracieusement reversés à la production. Top Chef,
une cuisine qui fait recette !
on peut dire que c'est envoyé !
RépondreSupprimercomme en cuisine, bien frais et épicé;
j'ai regardé une fois cette émission qui rappelle "On achève bien les chevaux" film mythique.
mcb
merci de cette mise au point vraiment bien analysée
RépondreSupprimerTRES BON ARTICLE BEAUCOUP DEVRAIT LE LIRE !!! biz a toi pierrot
RépondreSupprimertout y est et tout est dit!!! j'adore
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