Après l’entrée du repas à la
française sur la liste des patrimoines immatériels de l’Unesco en 2010, c’est
naturellement que les hautes instances étatiques nationales, par la voix du
secrétaire d’Etat rattaché au ministère de l’Economie, des Finances et de
l’Industrie, Frédéric Lefebvre, lui ont consacré la journée du 23 septembre,
premier jour de l’automne.
Qu’est-ce que la gastronomie
française ? Une succession de plats, des goûts, de produits, des
préparations ancestrales et modernes, une tradition, en d’autres termes, une
institution ! Le très noble foie gras, le pot-au-feu familial, les
fromages à pâtes crues plus étonnants et puants les uns que les autres, la
douceur d’un macaron ou de l’alcoolisée crêpe Suzette, le repas est chargé de
chaleur et de saveurs. Un moment de partage convivial, né d’une culture de la
table extraordinairement riche. Diverses manifestations ont tenté de le
mettre à l’honneur ce 23 septembre : piqueniques, dégustations de produits
divers, cours de cuisine, mais surtout, offres spéciales.
Qui dit offres spéciales dit
vente, achat, dépense, donc commerce. Et qui sont les plus importants acteurs
de cette fête « nationale » ? Quick, Buffalo Grill, Hôtel Ibis,
M6, qui a carrément recyclé notre brave ministre de la culture en hôte d’honneur
de l’émission de télé-réalité « Un dîner presque parfait ». Tiens,
l’Etat se paye un créneau dans le privé ? En tout cas, représenter la
gastronomie par ces enseignes est quelque peu scabreux… Côté projet national en
construction, c’est Avignon qui a été désignée ville-pilote. Un repas élaboré
par 8 chefs de la région et 3 traiteurs regroupant 550 personnes ayant réglé 15
euros participatifs, l’opération coûtant autour de 90euros par personnes, complément
payé par la municipalité et le Conseil Général de Vaucluse. Une belle
initiative, l’offre est accessible, et vise une initiation à la gastronomie
pour des personnes ayant peu de moyens. Malheureusement, on ne peut pas s’empêcher
de constater la clientèle, en accord avec la présence de Frédéric
Lefebvre : proche des institutions organisatrices, plutôt aisée, habituée
aux restaurants, et, point important, informée de la manifestation, pourtant passée
inaperçue auprès de la population locale.
Une déception pour la fête qui se
voulait diffuseuse et représentative des valeurs de la gastronomie française. La
démarche est purement commerciale et non philanthrope, le seul but étant de
relancer l’économie du secteur de l’hôtellerie-restauration, oubliant le
caractère culturel de la désignation. Autrement dit, on est loin de la fête
nationale au sens festif du terme. La volonté de Frédéric Lefebvre quant à l’inscription
de celle-ci dans les mœurs françaises, prenant volontiers pour exemple la fête
de la musique de Jack Lang, semble donc être utopique et déplacée, entraînant
un échec, au vu de l’impopularité de l’évènement. Une politique uniquement
tournée vers la tranche aisée de la population, décidément, le gouvernement
rate vraiment tous ses rendez-vous populaires…
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