"Mobilisation générale sur M6" ! Après une première émission sur le gaspillage alimentaire, c'est le "made in France" (et non pas "fait en France", parce qu'on n'est pas à une contradiction près) qui a été mis à l'honneur ce mercredi soir. Parce que la bouffe ça fait vendre, et que sur M6 ça fait des années qu'ils l'ont compris. En guerriers modernes, fervents défenseurs des "valeurs perdues" du pays pourtant fier comme un coq de sa gastronomie, les quatre ultra-médiatiques chefs Philippe Etchebest, Ghislaine Arabian, Yves Camdeborde et Cyril Lignac, se sont lancés dans la bataille en trifouillant les frigos des pros et particuliers. Pour prôner "plus de qualité et de sécurité alimentaire", mais aussi "pour garantir la survie des agriculteurs français", dixit la voix off.
Allez c'est parti pour la grande enquête ! Etchebest et Lignac déambulent dans la petite ville de Montereau à la recherche de foyers et restaurants prêts à ouvrir leurs placards et à n'acheter que du produit national pendant un mois (quid des épices, du sucre, de la sauce soja ? l'histoire ne nous le dira pas). Ainsi peut-on entendre s'extasier Philippe Etchebest -qui prête son image la bière 1664 brassée au Royaume-Uni- devant des cuisses de poulet emballées sous cellophane en barquette trouvées dans le frigo de quelque française lambda : "Ah très bien, volaille française !". Sachant que 80% des poulets français sont élevés en batterie, sans jamais voir la lumière du jour, et bourrés d'antibiotiques (selon cette étude de CIWF, ici ), la question de la qualité à la française se pose... Idem pour les pommes origine France saluées par nos deux combattants, dont on sait pourtant qu'elles ne contiennent en moyenne pas moins de 50 pesticides différents sur leur peau et dans leur chair, selon une étude de Greenpeace précisant que "le nombre de pesticides le plus élevé dans les sols a été détecté en Italie, en Belgique et en France." (voir ici l'article du Parisien sur le sujet). On en parle ? Non, pas sur M6 ! Là, on défend le MADE IN FRANCE, et c'est tout !
Avec 80% de produits d'origine inconnue trouvés chez les particuliers, et pas beaucoup moins chez le restaurateur aux 50ans de métier, les chefs se prêtent alors à l'exercice des courses en supermarchés. Et seulement au supermarché. Et les marchés ? Non, le Français ne fait ses courses qu'au supermarché, et puis on est M6 quoi ! Là, les deux loulous ne cherchent, bien sûr, QUE du français, en se fiant donc aux seuls petits caractères des étiquettes pour ce faire. Et s'aperçoivent de la difficulté de la tâche, perplexes face à un cassoulet de Toulouse ou une moutarde de Dijon. Pourtant, "tous les
industriels respectent la loi", puisque "du moment qu'elle est fabriquée -transformée- en France, elle est française". Se pose d'un coup l'importante question de la traçabilité, dont on se rend vite compte qu'elle est finalement fort difficile à tracer, enfumée dans des lois qui n'obligent aucun industriel à indiquer les provenances des matières premières. On ne peut que constater qu'ils ont mis le doigt sur quelque chose. Olé !
Alors les chefs poussent les investigations jusqu'en Inde, en Italie et au Brésil, à la rencontre de géants de l'agroalimentaire. Là, l'industriel
français spécialisé en cornichons explique l'attractivité du bas coût de la main d’œuvre en Inde, payée environ 4euros par jour estimés dramatiques par un Cyril Lignac
halluciné, auquel répond le patron "je sais pas si
c'est dramatique, mais c'est l'évolution". Pour ensuite entendre que le consommateur est responsable... Certes, mais les grands groupes à la recherche de profit maximum sur tout, le sont bien plus ! Puis se succèdent les scènes d'indiennes cueilleuses sous un soleil de plomb, les travailleurs chargés de balancer des cocktails de pesticides commandés par les
industriels européens sur les champs, en tenue trop légère pour être protégés, les poulets brésiliens qui ne parviennent plus à mettre une patte devant l'autre, les barils de sauce tomate venus de Chine et infestés d'insectes...
On remarque le soin particulier du discours à
déplacer l'horreur alimentaire à l'étranger, en omettant allègrement qu'elle existe bel et bien chez
nous aussi. Pour preuve, seulement 4% des surfaces agricoles françaises sont exploitées en bio, autrement dit sans traitement chimique outrancier (lire l'article du Monde ici). Parce qu'en vérité, on est bien loin de l'idyllique propreté de nos terres : "avec 80.000 tonnes de matières actives commercialisées en 2005, la
France est le 3ème consommateur mondial de pesticides et le 1er
consommateur européen" (les données ici).
Pour terminer cette contre-attaque télévisuelle, on a droit à un beau finish sur un banquet entièrement "réalisé" par nos guerriers toqués (qu'ils n'ont pourtant à coup sûr absolument pas préparé), à partir de produits exclusivement français, bien évidemment. Une émission qui frôle le militantisme de bas étage, et qui ne pousse surtout pas trop loin le bouchon, histoire de ne pas casser les sponsors et annonceurs de la chaîne, qui entrecoupent le tout de publicités rendant le message flou et paradoxal : Bonduel, Mc Do (dans lequel on retrouve les beaux cornichons), ou encore chips Lays. En bref, regardez M6, digérez, et continuez de consommer vos merdes industrielles, mais attention, uniquement françaises dorénavant ! Non, résolument, le mieux qu'on puisse faire est d'éteindre la télé, de se mettre au jardinage pour un beau potager, et d'aller rencontrer les producteurs passionnés sur les marchés ou dans leurs exploitations bios ou raisonnés. Et là, on pourra se vanter de monter sur le bon cheval de bataille !
En lisant votre article je souhaiterai apporter des bémols sur plusieurs choses certes M6 a compris comment vendre, par contre oui je pense que défendre les produits français c'est bien, non le raport qui est sorti de gren peace cette semaine ne dit pas tout, la France est le pays qui impose le plus d'interdiction aux agriculteurs sur l'utilisation ds pesticides par contre personnes ne l'interdit aux particuliers qui pollue davantage car là où l'agriculteur mettre 1 goutte de pesticide le particulier va noyer les feuilles de son potager ou de son herbe. La France est pollué oui mais regardons bien par qui.
RépondreSupprimerAutres les élevages intensifs existes certes par contre si on aurait un peu plus de lisibilité sur nos produits on serait mieux se que l'on achète et on pourrait mieux choisir la politique de notre pays et je pense que c'est pour cette raison que ce genre d'émission existe pour faire prendre conscience aux gens qu'ils ont le droit de choisir si ils le veulent et que ce n'est que par eux que la politique peut changer